Pourtant débouté à 11 reprises par le Conseil d’État, le gouvernement vient une fois de plus de déroger à la loi en prolongeant d’un mois la chasse des oies cendrées au-delà de la date de clôture officiellement fixée au 31 janvier.
Ce n’est plus de l’entêtement, c’est de l’acharnement obsessionnel ! Après le maintien des chasses traditionnelles telle que la chasse à la glu, ce nouveau cadeau offert aux chasseurs contrevient aux directives européennes qui interdisent de chasser pendant la période de migration prénuptiale.
Alors que l’effondrement de la biodiversité est aujourd’hui avéré, le gouvernement a donc signé un arrêté le 30 janvier 2019 autorisant la chasse de 4 000 Oies cendrées supplémentaires.
Pour faire valoir ce projet de prolongation, le ministère de la transition écologique s’appuie sur des arguments pourtant largement contestables sur le plan scientifique. L’arrêté ministériel évoque ainsi une « prolifération de l’espèce susceptible de créer des risques pour l’équilibre des écosystèmes » !
Les suivis hivernaux réalisés annuellement montrent qu’après avoir connu une forte progression, les populations d’oies cendrées sont en baisse ces cinq dernières années. Cette tendance est d’ailleurs largement observée sur le lac du Der-Chantecoq, 2ème site d’hivernage français après la Camargue. Le dernier comptage effectué à la mi-janvier a ainsi permis de recenser un peu plus de 2000 oies cendrées alors qu’elles étaient deux fois plus nombreuses en 2011.
Pour justifier cette dérogation, le projet d’arrêté faisait également référence à des dégâts agricoles de plus en plus importants au Pays-Bas, ce qui conduit les autorités à détruire une partie importante de la population. Bref, en tuant les oies en France durant leur période de migration, on réduirait les dégâts réalisés aux Pays Bas !
Là encore, l’expertise scientifique permet de facilement démonter cette argumentation.
Les oies cendrées appartenant à la population nord-ouest européenne font l’objet depuis 1984 d’un programme de suivi par baguage et marquage. Ces données montrent clairement que les individus observés en France sont en majorité (90 à 95%) originaires de Norvège, Suède et Danemark et non pas des Pays-Bas (source ONCFS - Amélioration des connaissances sur l’Oie cendrée en France - novembre 2014 – rapport initié à la demande du Ministère de l’Ecologie et de l’Environnement).
Les changements climatiques et agricoles ont en effet amené une grande partie des effectifs à se sédentariser au Pays Bas.
Parmi les arguments qu’ils répandent abondamment, les chasseurs indiquent que des campagnes de destruction massive d’oies par gazage sont organisées aux Pays-Bas pour limiter les dégâts agricoles. Or, les seules opérations de ce type sont exceptionnellement autorisées pour des raisons de sécurité aérienne et uniquement durant l’été.
Notons encore que la prolongation de cette chasse va fortement perturber d’autres espèces d’oiseaux d’eau qui n’ont plus à craindre des chasseurs depuis le 31 janvier.
Au regard de ces différents motifs, la LPO a immédiatement saisi le Conseil d’État pour demander la suspension immédiate et l’annulation de cet arrêté.