Courant 2011, la nécessité d'un batrachoduc a vu le jour grâce à une prise de conscience du Ministère de l'Environnement (CNPN, DREAL), du Conseil Général de la Marne et de l'Agence de l'Eau Seine Normandie, principal financeur du projet avec le Feder (Europe).
L'ouvrage est construit durant l'hiver 2011-2012 sous maîtrise d'œuvre du CG 51. Ce passage est constitué de 17 busages enterrés sur une longueur de 700 m (soit environ tous les 40 m). Les animaux sont amenés aux passages sous route grâce à un muret les guidant jusqu'aux entrées sans qu'ils soient contraints d'y pénétrer.
Le printemps 2012 fut donc la première réelle année où les amphibiens ont rencontré ce nouvel « obstacle ». A la demande de l'AESN et de la DREAL un suivi de l'efficacité de l'ouvrage est mis en place. Ce suivi est logiquement confié à la LPO CA qui possède une expérience unique sur le site et les connaissances nécessaires (suivi de 13 ans avant la création du batrachoduc) pour suivre cette population d'amphibiens. Il est indispensable de vérifier le fonctionnement de l'ouvrage, les amphibiens étant réputés pour avoir des difficultés à s'habituer à toute modification de leur environnement et de leur territoire.
Les suivis précis sont rares dans la bibliographie et en particulier en France. Une impression générale ressort : il faut souvent du temps pour que les animaux acceptent d'utiliser les tunnels et parfois de petits détails peuvent entraîner des grosses difficultés non imaginables.
Après trois ans de suivi, le constat est clair. Les anoures (grenouilles et crapauds) acceptent l'ouvrage au fil du temps et les résultats ont évolué favorablement entre 2012 et 2014. En 2014, environ 75 % des Grenouilles rousses et 90 % des Crapauds communs transitaient par les tunnels. On peut donc conclure que ce batrachoduc est une réussite pour ces espèces. Nos résultats rejoignent les observations faites sur de nombreux ouvrages, il faut du temps mais les pourcentages de passage augmentent.
Pour les urodèles (ici Tritons ponctué et alpestre), les résultats sont inquiétants car en 2014, nous estimons que moins de 10% de la population utilise les tunnels. De plus, une partie de la population semble « stagner » au pied des murets, refusant d'utiliser les tunnels et ne rejoignant pas les sites de ponte.
Il est impossible de savoir si les tritons vont s'adapter et si oui à quelle vitesse. La bibliographie ne nous renseigne pas, d'aussi importantes populations de tritons (> 15 000 individus) n'ayant, à notre connaissance, pas été étudiées sur ce sujet.
L'espoir demeure car n'oublions pas qu'il y a 40 ans, la population d'amphibiens en place a assimilé de nouvelles zones de ponte (lac du der), une route, une route sur digue, une digue, des enrochements... et ils ont fini par trouver un chemin.
Une bonne nouvelle tout de même, la création de mares à quelques centaines de mètres en amont de l'ouvrage. L'EPTB a décidé de créer des mares avec les conseils techniques de la LPO. Ces dernières ont été creusées en novembre 2014. Le suivi de leur colonisation par les amphibiens et en particulier les tritons sera très intéressant. Parallèlement un suivi des zones de ponte côté lac permettra de savoir si une population de triton y est encore présente.
Pour plus d'informations :